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ÉPISODES

Et le vent en des soirs d’orgueil et de mystère,
Rebrousseur des toisons effrayantes et douces,
Échevelait éparses les crinières rousses.

Voici que meurt la fête ardente de la Terre,
Et les feuilles s’en vont comme des rêves las
Ou des fibres de chanvre arraché des quenouilles,
Et dans le deuil des bois dénudés et lilas
Tout l’inutile sang des antiques dépouilles,
Goutte à goutte, a saigné sur la Terre assouvie ;
Et les abeilles d’or fuyant les ruches vides,
Ivres des chauds midis en fleurs et de la Vie,
N’ont pas laissé de miel en les gueules avides.

Le Printemps a donné d’excessives prémices,
Trésors que l’implacable Automne a dissipés,
Et la brume qui monte aux horizons trempés
Fume comme l’encens d’injustes sacrifices.

Le vol aveugle et lourd des Oiseaux du Stymphale
Tourne en cercle au ciel noir où vibre le défi
Du clair rire équivoque et railleur de l’Omphale
Au lointain d’ombre et d’eaux de son Jardin fleuri,
Et les flèches du vent sifflent à travers bois
Où s’entend un galop ravisseur et sonore