Page:Réglemens sur les arts et métiers de Paris, rédigés au 13 siècle, et connus sous le nom du Livre des métiers d'Étienne Boileau.djvu/41

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
xxvj
INTRODUCTION.

L’abbé en appela au Roi. Le parlement de Philippe décida que l’abbé avoit été dans son droit, et ordonna la main-levée de la saisie ; cependant la hanse fut assez puissante pour empêcher l’exécution de l’arrêt[1]. Elle força de même l’évêque de Paris de relâcher un bateau chargé de figues et d’autres denrées qu’un marchand espagnol avoit amené par la Seine, que la hanse déclaroit confisqué, et dont l’évêque, en sa qualité de seigneur de Saint-Cloud, avoit voulu s’emparer[2].

Plus d’une fois l’autorité royale invoquée par les forains fut obligée de restreindre la hanse aux limites de son privilège, qu’elle tendoit sans cesse à dépasser. C’est ainsi par exemple qu’elle prétendoit avoir le droit d’empêcher les habitans riverains au-dessous de Paris d’embarquer les vins de leur crû, pour les expédier en Normandie. Il fallut que le parlement du Roi se prononçât en faveur des vignerons dont la hanse avoit déjà saisi les denrées[3].

La hanse étoit pourtant assez bien partagée pour se contenter de ce qu’elle possédoit. En effet, indépendamment des bénéfices qu’elle retiroit de la navigation sur la Seine, elle exerçoit des droits importans qu’elle avoit obtenus des Rois pour accroître sa puissance.

Afin de pourvoir aux frais de construction du port du côté du Louvre, elle s’étoit fait accorder par Philippe-Auguste le droit de lever un impôt sur les denrées qui arrivoient par eau[4] : ils avoient acheté les criages de Paris, dont j’expliquerai plus tard la nature, et qui étoient la source d’un revenu important. Enfin c’étoient les magistrats de la marchandise de l’eau qui nommoient les mesureurs de grain et de sel, les courtiers, les jaugeurs, en un mot tous les préposés subalternes au commerce des vivres et du combustible.

  1. Voyez l’arrèt et la suite parmi les pièces de ce volume, p. 452.
  2. « Tandem cum pluries fuisset super hoc altercatum, quæ ipsa arrestatio facta fuit in cursum aquæ in quo Rex habet justitiam, idem episcopus…. apud Vicenas hæc facta emendavit Domino régi. » Arrêt du Parlement de l’an 1263, tiré du vol. 1 des Olim. et inséré par Lamare dans le tom. II de son Traité de la Police, p. 4.
  3. « Judicatum fuit quod vina hujusmodi non erant mercatura sive mercandisia. » Arrêt du Parlement de l’an 1264, tom. 1 des Olim. et inséré par Félibien au tom. I de l’Histoire de Paris. Un autre arrêt (ibid.), de l’an 1277, leur ordonne de restituer un bateau saisi à un marchand de Gascogne.
  4. Charte de l’an 1215, tom. I de l’Histoire de Paris.