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à qui l’on doit des œuvres dont les moindres sont arrivées jusqu’à nous, et dont il faut voir les plus beaux spécimens sur place dans leur cadre, tel le Daïboutz de Kamakura, colosse de métal doré d’un style si pur, et tous ces objets d’usage courant en ivoire, en faïence, en bronze, etc.

Saugrenus !… Ces héros et ces héroïnes qui égalent en courage et en vertu tout ce que notre histoire et nos mythologies ont à nous offrir de plus grand et de plus beau !

Il faut plaindre l’esprit superficiel, qui n’a pas su voir tout cela, à l’égal de ces faux artistes qui n’ont su retenir que le côté platement caricatural d’une civilisation encore si fertile en beautés sobres et délicates[1], et se sont plu à représenter les Japonais aux prises avec les engins étrangers à leurs mœurs et à leurs traditions, spectacle ridicule s’il en fut !

C’est qu’ils ont fait du chemin, en quarante ans, depuis le jour où M. T. Harris, le représentant des États-Unis, débarqua à Simoda pour mettre à exécution la convention imposée par le commodore Perry.

En ce temps-là, les Japonais, manquant d’informations précises, échangèrent leur or pour de l’argent — à poids égal !

  1. Japanese taste in painting, in furniture, in floral decoration, in all matters depending on line and form, may be summed up in one word : Sobriety. The bluster which mistakes bigness for greatness, the vulgarity which smothers beauty under ostentation and extravagance, have no place in the Japanese way of thinking. The alcove of a Tokio or Kioto drawing-room holds one picture and one flower-vase, which are changed from time to time. To be sure, picture and vase are alike exquisite. … When will Europe learn afresh from Japan that lesson of proportion, of fitness, of sobriety, which Greece once knew so well ?
    B. H. CHAMBERLAIN. (Things Japanese).