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dégénération et la corruption : si je m’en souviens bien, Aristote observe que la démocratie a beaucoup de points de ressemblance frappans avec la tyrannie[1] ; ce dont je suis certain, c’est que, dans une démocratie, la majorité des citoyens est capable d’exercer sur la minorité les oppressions les plus cruelles, lorsque quelque division forte domine, ce qui doit souvent avoir lieu dans un tel ordre de choses ; et que cette oppression sur la minorité sera bien plus multipliée, sera bien plus outrée dans ses fureurs, que ne pourrait jamais l’être celle qui dériverait de la cruauté d’un seul monarque[2]. Ce qui est à remarquer sous une telle persécution populaire, c’est que les victimes y sont dans une situation bien plus déplorable que dans toute autre. Sous un prince cruel, elles ont, pour calmer la douleur cuisante de leurs blessures, ce baume de la compassion que leur offre l’humanité ; elles ont tous les applaudis-

  1. « Un peuple, en tant que monarque, à tous les caractères du tyran. Dans une démocratie absolue et dans la tyrannie, vous retrouvez mêmes mœurs, même despotisme à l’égard de la classe distinguée, même arbitraire dans les décrets du peuple et dans les ordonnances du tyran. Le démagogue et le courtisan out également les mêmes rapports de ressemblance ; la même analogie ; tous deux jouissent du plus grand crédit, le courtisan auprès du tyran, le démagogue auprès du peuple, » (Aristote, Polit. liv. 4. chap. 4.)(Note de l’Éditeur.)
  2. Nous savons maintenant si les quarante-quatre mille sociétés populaires et comités révolutionnaires ont assez justifié l’assertion de Burke ; mais pour combien de gens l’histoire de ces tyrannies démagogiques n’est elle déjà que de l’histoire ancienne ?(Note de l’Éditeur.)