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concilier les hommes dans leurs démarches et dans leurs projets, comme cette supposition qu’il n’y a pas de milieu entre ce qu’ils proposent, et une tyrannie aussi odieuse qu’aucune de celles dont les fastes de l’histoire ou les imaginations des poètes nous ont laissé des modèles. Tous ces propos de leur clique méritent à peine le nom de sophismes ; ce n’est rien autre chose qu’une franche impudence. Ces messieurs n’auraient-ils jamais entendu parler, dans tout le cercle de leurs mondes de théorie et de pratique, d’aucune chose mitoyenne entre le despotisme d’un monarque et le despotisme de la multitude ? N’ont-ils jamais entendu parler d’une monarchie gouvernée par les lois, contrôlée par les grandes richesses et par les dignités héréditaires d’une nation ; et soumise en outre l’une et l’autre à une autre opposition judicieuse venant de la raison et de l’âme du peuple, agissant en corps par l’organe d’un représentant permanent et convenable ? Est-il donc impossible de rencontrer un homme qui, sans intentions méchantes et criminelles, ou sans une absurdité pitoyable, préfère un tel gouvernement mixte et tempéré, à l’un ou à l’autre des extrêmes ; et qui puisse aussi regarder comme dénuée de toute sagesse et de toute vertu, une nation qui, n’ayant qu’à vouloir pour obtenir sans peine un semblable gouvernement, ou plutôt pour consolider celui qu’elle avait déjà, aurait pensé qu’il était préférable de commettre des milliers de crimes, et d’attirer sur son territoire des milliers de maux, afin de l’éviter ? Est-ce donc une vérité si généralement reconnue, que la démocra-