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et de tous les bienheureux du paradis (voyez Boire aux anges, page 60) ; et cette coutume devint une telle source d’ivrognerie, que divers conciles la condamnèrent, et que Charlemagne la prohiba par un article de ses Capitulaires.

Cet empereur défendit en outre à ses soldats de boire à la santé les uns des autres, parce qu’il en résultait des querelles et des combats entre les buveurs et ceux qui ne voulaient pas leur faire raison.

Dans le temps des Vaudois, les inquisiteurs éprouvaient la foi d’un chrétien suspect en lui ordonnant de boire à saint Martin, parce que saint Martin était le patron des buveurs, et peut-être aussi parce qu’il s’était montré le protecteur de certains hérétiques de son époque, en leur ménageant la clémence de l’empereur Maxime qui voulait les sacrifier au zèle sanguinaire de quelques évêques.

Des historiens dignes de foi rapportent que les Écossais n’élisaient jamais un évêque avant de s’assurer qu’il était bon buveur, ce qu’ils fesaient en lui présentant le verre de saint Magnus, qu’il devait vider d’un trait. L’accomplissement de cette condition, assez difficile à remplir vu la grande capacité du verre, était regardé comme un présage certain que l’épiscopat serait heureux.

Les moines, au moyen âge, fêtaient les anniversaires des personnes qui leur avaient laissé quelque legs, en mettant à sec de grandes bouteilles, appelées pocula charitatis, dans une assemblée gastronomique appelée charitas vini ou consolatio vini. On assure qu’ils portaient la santé du testateur décédé, en s’écriant : Vive le mort ! Les Flamands instituèrent un grand nombre de ces charités qui servirent à enrichir les monastères. C’était une croyance superstitieuse que les morts étaient réjouis par ces pieuses orgies : Plenius inde recreantur mortui, dit une charte de l’abbaye de Kedlinbourg en Allemagne. Voilà sans doute la raison qui engagea un chanoine d’Auxerre nommé Bouteille à fonder, en 1270, un obit en vertu duquel on devait étendre un drap mortuaire sur le pavé du chœur de l’église, avec quatre grandes bouteilles de vin placées aux quatre coins de ce drap,