une fête ; je crus que votre main caressait ma poitrine et voulait m’enchaîner avec un fil d’or, ou qu’une aile de flamme passait à travers mes crins échevelés ; mais sitôt qu’il m’eut touché, le rayon dégoutta comme une source et jaillit en écume. Ah ! Si jamais je trouvais un rivage, un monde autre que moi, je m’y ferais un lit d’écume blanche, de la poussière des perles, des cristaux du corail, des racines de l’algue, des coquilles de pourpre ; mes eaux s’y suspendraient, seigneur, comme le glaive pend à votre ceinturon. Toute la nuit je baiserais le sable sur mes rives ; mes vagues haletantes se gonfleraient sans murmurer ; il n’y a que vous qui pourriez dire : c’est là qu’elles sommeillent.
Léviathan, en s’élançant des eaux sur la terre ferme.
Qui m’a jeté hors du gouffre ? Qui m’a donné
mes écailles polies, mes mâchoires béantes, ma
queue couleur des herbes de la grève ? L’eau
rampe sur la plage, les îles s’accroupissent
dans la brume, le vent miaule dans les rochers,
l’abîme ouvre sa gueule, les vagues s’enflent
en mamelles, les flots se poussent comme un
troupeau de crocodiles qui se pendent à leur
mère ; les crêtes des montagnes brillent comme
des écailles broyées entre les dents de
Léviathan.
L’Oiseau Vinateyna.
Océan, mer transparente, plus bas, encore plus
bas ; replie tes larges eaux comme je replie
mes ailes quand je veux m’arrêter ; encore,
encore ! Laisse-moi voir jusqu’au fond de ton
lit comme ils sont beaux mes pieds d’or, mon
bec d’or, mon envergure de vingt coudées ;
toi qui sais tout, dis-moi où j’étais ce
matin. Avais-je donc plié mon col sous mon
aile au bord du chaos, ou si je dormais dans
mon duvet sur un rocher d’argent ? Dis-moi
qui m’est venu prendre dans mon nid, qui m’a
pos