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sur l’autre, et mes soleils, comme des briques encore ardentes, se bâtissent en tourelles et en donjons blasonnés, en ogives reluisantes d’onyx et d’opales, et en cathédrales de lumière.



(à Mob.)De ce côté, qui sont ces peuples que je ne connais pas ?



Mob.

Ils viennent du pays où l’encens croît sur les arbres.



Chœur des Arabes.

Un sabre ciselé à Damas, quand on le tire de son fourreau, brille mieux qu’une torche dans la nuit : et moi, mon maître m’a tiré de ma nuit, comme un sabre ciselé, pour me faire étinceler à l’arçon de sa selle à l’heure des batailles.

Mon tranchant s’est aiguisé sur la pierre du sépulcre du Calvaire, et ma lame a retenti sur la cuirasse de Cordoue et de Grenade la belle.

Quand votre fils est mort et que le Carmel a tremblé, je suis parti pour semer devant moi le sable et le sel, partout où me menait mon prophète de colère. Sur mon écu enluminé, je portais pour devise : feu et sang. J’ai élevé mes minarets dans le désert, comme des phares sur la mer. Et, si quelque ville égarée, se croyant seule, se relevait sur son séant pour regarder du côté du Golgotha, je la décapitais ; et j’enterrais dans mes citernes sa lourde tête, avec sa chevelure de colonnes que je dénouais sur ses épaules. J’ai conduit par la bride et éperonné dans le chemin le vent de l’Arabie jusque dans la vallée de Roncevaux, sous la bannière de Charlemagne. J’ai noué dans l’Alhambra, par mon anneau de fer, deux rivages qui se cherchaient en murmurant tout haut, l’Atlas et les Espagnes, l’orient et le couchant, que vous aviez oublié d’attacher l’un à l’autre. Quand mon désert se fut ainsi accru à l’entour du tombeau de votre fils, je m’assis pour veil