tes de
plus de dix coudées. La montagne de Cachemire était
un mur qui nous fermait le ciel ; les palmiers
que vous aviez plantés étaient montés jusqu’à
toucher les nuages ; les fleuves couraient si
vite le soir du jour où vous avez rempli
leurs urnes, que nous ne pouvions enjamber leurs
rivages ; la mer était si large, que nous ne
pouvions suivre des yeux son cours jusqu’à
sa source. Quand nous élevions nos tours plus
que vous vos palmiers et que votre mont de
Cachemire, nous voulions monter ainsi, par
l’art de nos mains, plus haut que votre création,
pour vous voir passer au delà de votre œuvre,
comme un homme que des enfants regardent dans
sa cour derrière l’enclos de son champ
d’héritage. Maintenant laissez-nous renaître ;
laissez-nous retourner en arrière, vers la
citerne où nous buvions. Si vous voulez, nous
chargerons de nouveau nos chameaux pour
repasser, en caravanes, le désert de la mort.
Cette fois, seigneur, nos vases seront d’un or
plus pur ; nos murailles seront mieux peintes ;
et nous polirons nous-mêmes, de nos mains, nos
nouvelles pyramides.
Toutes les Villes D’Orient.
Oui, seigneur, laissez-nous revivre ; nous vous
ferons encore des obélisques de porphyre et des
temples souterrains pour y rester à l’ombre
encore plus de mille ans. Cavaliers, archers,
fantassins, nous renverrons nos armées en
messagers par le même chemin ; nous compterons
les mêmes siècles sur nos doigts, sans ennui,
comme une femme compte à son cou les perles de
son collier, après qu’elle a fini ; nous jetterons
les mêmes noms, je vous jure, dans notre sable
et nos tombeaux, comme le bouc de l’Iran, qui
revient sur ses pas, jette après lui même
poussière. Nous savons encore nos vieilles
hymnes et nos poëmes dont vous étiez le héros ;
en suspendant nos harpes aux mêmes saules,
nous les redirons à la même heure ;