Page:Quinet - Œuvres complètes, Tome VIII, 1858.djvu/358

Cette page n’a pas encore été corrigée

mais il m’a fallu faucher dans votre pâturage tant de villes crénelées, tant de tours et de poternes, tant de phares sur les grèves, tant de pyramides dans le sable, que son tranchant est ébréché. Donnez-m’en une autre, je vous prie.



Le Père éternel.

Ma prairie est fauchée, et les faneurs ont porté dans leurs bras mon foin pour mes cavales sous le toit de mon étable. Maintenant, pends ta faux à l’entrée. Fais passer devant moi tous tes morts, pour que je sache tes journées et quel salaire t’est dû.



Mob.

Comme une procession à pâques sort des portes de Saint-Marc de Venise ou de Saint-Pierre de Rome, essaim mitré qui bourdonne votre nom en quittant sa ruche ; ainsi, de ma noire cathédrale, par ma porte entrebâillée, vont sortir à la lumière mes peuples et mes essaims d’empires. En tête, je porterai la bannière ; le néant, qui se prélasse, se tiendra sous le dais. De leurs corbeilles, les nations laisseront tomber, en passant, maintes fleurs fanées, maintes espérances trop tard cueillies.

Dans leurs mains l’encensoir ne jettera que cendre, et ma cloche fêlée dans ma tour hurlera pour appeler leur nom. - mes meilleurs morts sont les dieux, c’est par leurs éternités que je commence, en entonnant avec eux le psaume xcix, verset 3, page 13.



Chœur des Dieux Morts.

Amen.

Pour des hommes, il est dur de mourir ; mais pour des dieux, cent fois pire est l’agonie. Le glas tinte pendant mille ans ; notre haleine, en s’éteignant, fait soupirer tout