Cherchez où vous voudrez vos génisses blanches :
nous ne connaissons plus votre cornemuse. Nous
sommes, nous, une ronde de filles à marier qui
nous donnons la main. Seigneur, changez, de
grâce, pour un habit de fête, notre ancienne
robe de vapeurs. Pour amoureux, jamais nous
n’avons eu à notre porte que l’aigle qui nous
baisait de son aile noire ; pour fiancé, que
le chamois, et pour époux, que le torrent qui
roule sous nos pieds. Sans faute, chaque jour
nous avons porté les fleuves dans nos jattes,
comme la laitière qui descend du chalet. Mais
l’été est fini ; l’hiver du monde approche...
laissez-nous aussi, nous, descendre de nos
cimes pour voir, à notre tour, dans la vallée,
passer sur notre seuil ouvert les voyageurs,
les marchands, les moines et les joueurs de
chalumeaux.
Le Père éternel.
Vous avez douté une heure dans le fond de vos
grottes. Allez, je me ferai de tous vos sommets
ensemble, l’un sur l’autre, un banc de pierre
pour m’asseoir sur ma porte.
L’Océan.
Souvenez-vous, seigneur, du jour où vous me meniez
paître pour la première fois ; souvenez-vous de
l’heure où j’étais seul, sous vos yeux, dans
votre immensité. Alors votre main me caressait
comme son chien fidèle ; alors vous me preniez
vous-même dans vos bras pour m’apprendre à
bondir sur mon roc, comme un petit chamois
que son père mène pour la première fois dans la
prairie des Alpes. Vous m’aimiez dans ce
temps-là ; ma brise était si fraîche ! Mon
sable était si neuf ! Je me voyais moi-même
azuré et mes membres limpides jusqu’au fond
de mon lit, comme une jeune fille sous ses
rideaux de fiancée. Maintenant qu’ai-je donc
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