Page:Quinet - Œuvres complètes, Tome VIII, 1858.djvu/289

Cette page n’a pas encore été corrigée

, ni sur le mont.



Nous avons fait mille détours, sans jamais nous retrouver ; nous avons monté mille degrés sans jamais nous rencontrer ; nous avons frappé à mille seuils, et toujours un étranger nous a ouvert. La vie nous a divisés, et la mort fera comme elle. Un dur destin ne voudra pas donner à nos os même terre. éternellement nous nous retournerons sur le côté dans nos tombes moitié vides, moitié remplies, en criant chacun : est-ce toi ? éternellement nous nous chercherons à l’endroit où toute chose renaît, sans jamais nous reconnaître.

Pour me désennuyer, j’ai vu plus d’un ciel, plus d’une source, et plus d’une ville remplie d’hommes. Pas un ciel n’est si pur que ses yeux ; pas une source n’est si profonde que son cœur ; pas une ville, dans un jour de fête, n’est si remplie que l’escalier où elle monte chaque jour.

Il y a sept ans que cette larme a coulé ; et, si tu veux le savoir, un monde impur, pour qui rien n’est sacré, en fut la cause. Jamais il n’a pu croire que j’adorais une pensée, comme lui adore son limon ; ni que mes yeux, sur la colline où les vignes mûrissent, ne cherchaient qu’une image du ciel. Eh bien, es-tu content, monde que j’ignorais ? Ah ! Que t’ai-je donc fait pour me tuer si vite ? Calomnie, calomnie noire, qui germais autour de moi, là où mes pieds marchaient ; mensonge de damné, qui as vécu dans mon ombre, es-tu content ? Ni larmes dans mes yeux, ni souffle dans mon âme, ni chimère à nourrir, ni pensée à bercer, ni cieux, ni terre, ni moi, ni elle, je n’ai plus rien, rien ! Et ce mot, tu l’as écrit de ton venin partout où je regarde.