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emporter, sous son tablier, un sceptre à fleurs de lis, trois crosses d’évêques et de papes.

Si c’est la veuve d’un forestier, dis-moi le nom du bois où les sceptres à fleurs de lis croissent en pleine terre, et où le bûcheron coupe sur la branche verte des crosses argentées d’évêques et de papes.



Le Veilleur.

J’ai rencontré deux femmes dans la maison du forestier. La plus vieille est ridée ; tout le jour elle file, les pieds dans la cendre ; la plus jeune chante avec le sansonnet. Elles sont venues à noël sur un bateau de pèlerin.

Ce sont de braves femmes qui ne manquent pas les sacrements. Elles ont toujours une pièce d’argent, quand le moine va faire la quête.

Que Dieu le leur rende !



Saint Eloi.

O mon roi ! Vous m’avez réveillé sous mon dais.

Ne craignez rien. Ce que vous avez vu est un rêve que vous avez fait dans votre lit d’or massif. Montez sur votre trône ; je vais vous l’expliquer. La vieille femme qui cherche du bois mort dans son tablier, c’est l’église, qui se lève de son lit pour sauver les fidèles.

Le sceptre doré, c’est l’âme qu’elle trouve perdue sous la rosée dans les broussailles.

La maison à trois degrés du forestier, c’est le ciel, où le père éternel est assis. Les feuilles qui bruissent, c’est le monde qui gémit. Le hibou qui piaule sur le toit, c’est le Christ, qui, du haut du paradis, appelle l’âme égarée qui s’attarde dans sa route.



Le Roi.

Grand saint, je le sais, vous avez plus de sagesse que tous les rois chevelus n’en ont sous leurs couronnes. C’était un rêve, je le crois, mais un rêve qui ressemblait à ce qu’on voit dans la veille. Mon Dieu, que sont-ils devenus les temps où nous limions sans souci dans votre orfévrerie