hel.
Tu chercheras un baume, et tu trouveras un venin ;
tu chercheras ton rêve en te levant sur ta
natte, et tu trouveras ta blessure dans ton
cœur.
Ahasvérus.
Je sens un poison sur mes lèvres, que je bois à
chaque haleine. Sera-t-il demain aussi amer ?
Saint Michel.
Plus amer le lendemain que la veille, le soir
que le matin ; plus amer au fond de ton outre
que sur les bords ; plus amer en ton gîte
qu’en voyage, en voyage qu’au départ ; plus
amer dans une coupe d’or que dans le creux
de ta main ; plus amer dans l’étoile que dans
la tempête ; plus amer que dans l’étoile et la
tempête sur les lèvres et dans les yeux de ton
hôte.
Ahasvérus.
Mes pieds sont pesants ; je ne pourrai pas
arriver jusqu’aux bergers d’Arabie, jusqu’aux
peuples des forêts.
Saint Michel.
J’ai amené pour toi le cheval Séméhé qui errait
nuit et jour depuis le matin du monde. En te
voyant, sa crinière se hérisse ; ses pleurs
tombent sur le sable. De sa corne d’argent,
il creuse le seuil de ta porte ; les divs du
désert lui ont mordu les flancs ; dans ses
naseaux, il appelle le juif errant. Prends
dans ta main ton fouet, pour que son sang
trace ton sentier.
Ahasvérus.
La nuit n’est pas encore venue. De grâce,
laissez-moi dire adieu à mon père, à ma sœur
et à mes petits frères.
Saint Michel.
Je le veux bien. Cet adieu sera long. Si j’étais
homme, je te plaindrais. Va ! Avant de
t’appeler, j’attendrai que le