Sans chariots et sans mules, s’il faut voyager,
qu’est devenue ma ville avec ses mille tours ?
De honte elle a caché, comme une autruche,
sa tête sous le sable, et son poitrail sous
les broussailles. Cet enfant-Dieu, pour
jouer, a effacé de son doigt mon royaume.
Mes peuples ont disparu sans m’attendre,
comme un nœud qu’il a dénoué en s’amusant.
Mes châteaux sont en poussière. Holà !
Qu’un lion d’alentour, au fond de son gîte,
fasse une place pour la nuit au roi de
Babylone !
Melchior, Roi De Perse.
Un arabe a passé sur une cavale rapide, pour
emporter en croupe mes peuples dans sa tente.
Mes nations, mes satrapes et mes dieux
tiennent aujourd’hui dans le creux de ma
main. Bel enfant, qu’avez-vous fait ? Vous
avez renversé dans votre étable le pays
d’Orient, comme une jatte pleine de lait.
Le Roi De Saba.
Asseyons-nous par terre pour pleurer. Tout
s’efface ; nos corps s’évanouissent ; nos
royautés, dans nos mains, deviennent de la
cendre ; nos majestés s’évaporent comme un
brin de fumée au feu d’un berger.
Balthasar, Roi De Babylone.
Voyez ! Je ne suis plus ni roi, ni fils de roi ;
mes larmes sont devenues un ruisseau où les
grues viennent boire dans les murs de mon
palais.
Melchior, Roi De Perse.
Je ne suis plus qu’un murmure dans les bruyères
de mes salles, qui répète toujours : fleur
d’épine, fleur d’Asie, ta couronne est tombée.
Le Roi De Saba.
Et moi, qu’un rayon argenté dans la nuit, q