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S’il porte une auréole au lieu d’un diadème ;
Un homme contre tous, s’il se dit à lui-même :

" Bonaparte, debout ! Sauve Napoléon !
Fais-toi d’airain, mon cœur ! Sonne plus haut, mon nom !
D’un côté, l’univers ; puis un homme, de l’autre !
Octroyons le duel. Ce champ clos est le nôtre.
Mêlons dans notre coupe et le mal et le bien ;
Acceptons tous nos jours, et n’en rejetons rien.
Adieu, grand empereur ! Salut, soldat d’Arcole !
Reprends tes jours dorés, reprends ton auréole.
Nous avons assez fait pour nous faire éternel.
En attendant la nuit, où le plus fort retombe,
Combattons aujourd’hui pour nous faire une tombe.
L’étoile de Lodi remonte dans le ciel.
Oui, la lutte me plaît ; grandissons avec elle.
Avec un monde vieux, vidons notre querelle.
Montrons à nu sa plaie et ses ennuis cuisants.
Fantôme du passé, colosse de mille ans,
Colosse de néant, qui m’étreint, que je foule,
Dans ma chute, avec moi, que tout un monde croule !
Un monde qui n’est plus, quand il croit tout remplir !
Un passé moribond qui s’appelle avenir !
Un présent apostat qui se vieillit lui-même !
Un néant usurpé qu’on nomme un diadème !
Un trône fait de bois, et que ronge le ver
En attendant le roi, comme un cercueil ouvert !
Le fantôme me tue !… et moi, dans ma ruine,
Je conserve à mon front sa couronne d’épine,