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A dit : écoutez-moi, vierge au bras tout-puissant !
Vase de mon combat, remplissez-vous de sang.
Qu’ont dit les hidalgos, aux lances indomptées,
Qu’ont dit les guérillas, aux balles enchantées,
Quand la voix du clairon a sonné dans leur cœur ?
Leurs lèvres n’ont rien dit. Sans changer de couleur,
Les hidalgos ont pris les lances espagnoles ;
Les saintes guérillas, les longues espingoles.
Leur lèvre ne veut plus sourire en un festin,
Tant qu’il vous reste un fils qui n’est pas orphelin,
Bourgogne, Roussillon, Guyenne, Normandie.
Leur bouche ne veut plus goûter la sainte hostie,
Avant que l’ossuaire élevé dans Burgos
Ne réveille, en sa soif, l’ourse de Roncevaux.
Ah ! Fier taureau de Corse ! Au milieu de l’arène,
Tu cherches ton étable avec ton auge pleine,
Et tu ne vois partout que le tauréador.
Qu’as-tu fait de ta source au pied du mont Thabor ?
Vers ton étang d’Arcole, où sont tes pâturages ?
Sous l’orme de Wagram où sont tes frais ombrages ?
Que cherches-tu de l’œil au bout de l’horizon,
Ton berger d’Austerlitz, assis sur le gazon ?
Va ! Tes cornes d’airain sont de fleurs couronnées,
Et ta barrière est close au pied des Pyrénées.
Burgos a pris sa lance et son rouge étendard.
Valence son épieu ; Grenade a pris son dard.
Dans ton chemin sanglant, ton front au joug d’ivoire
Ne ramènera plus le soc de ta victoire.