Et désormais les morts, en leur tombe muette,
Ne s’éveilleront plus au cri de la trompette.
Chacun jusqu’à son lendemain
Dormira son sommeil. Dépouillant son armure,
Le siècle, à pas légers, foulera sans murmure
Nos os qui marquent son chemin.
La paix au front de vierge a clos les funérailles.
Les mères, en berçant l’enfant de leurs entrailles,
Ne pleureront plus leur aîné.
La famille au foyer, comme un nid d’hirondelle,
Ne sera plus ravie à l’aile paternelle,
Ni le printemps trop tôt fané.
Seigneur, fais que ton nom jusqu’à nous retentisse !
Sous les pas des chevaux que l’herbe reverdisse !
Relève les épis foulés.
Donne, donne aux vivants ce que les morts possèdent !
De frères nouveau-nés qui l’un l’autre s’entr’aident
Remplis les états dépeuplés.
Fais, désormais, grand Dieu, les nations jumelles.
Que leur joug soit léger à leurs têtes rebelles
Comme nos couronnes de fleurs !
Et nous, dans notre nuit, grand Dieu, Dieu des armées,
Nous bénirons ton sceau sur nos lèvres fermées,
Et ta blessure dans nos cœurs. "
Ainsi les morts chantaient. Les vivants, sur leurs dalles,
Se taisaient, et raillaient les vieilles cathédrales ;
Car ils avaient alors oublié de prier.
Ils pensaient : qui croira, sans nous injurier,
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