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Pâle tour d’Occident, qui combattra pour toi
Quand sur tes fondements tu sens crouler ta foi ?
Tes cieux sont plus déserts que les cieux d’Arabie,
Du limon des vieux jours ta citerne est remplie.
L’hysope croît sur toi comme aux flancs du Carmel,
Ta chute a devancé les chevaux d’Ismaël.
C’est d’avoir dans ton ombre assez vécu d’années,
Assez vécu de jours, de soirs, de matinées.
Quand ton blême soleil s’éteint en son été,
Couche-toi dans ta poudre et ta fragilité ;
Et laisse vivre encor ses siècles de merveille
À ta sœur d’Orient que ta chute réveille.
Dans le champ du passé va-t’en semer le sel ;
Déracine en ton sol toute plante du ciel ;
Poursuis ton Dieu caché jusqu’en son tabernacle,
Et renverse sur toi son culte et son oracle,
Pour qu’en voyant l’abîme où ton espoir se perd,
L’Arabe puisse dire : " Ah ! C’est mon grand désert. "
Hâte-toi dans ta nuit jusqu’au fond de descendre.
De ton Christ au tombeau disperse au loin la cendre.
Efface à ta muraille et la vierge et les saints,
Et tes vœux immortels, et tes sacrés destins,
Afin de ressembler, en ta douleur murée,
À la tour du lépreux vers Damas égarée.
Car voici qu’au galop le pacha de Damas
Vient au-devant de toi vers le puits des combats.
Tout son peuple le suit ainsi qu’une gazelle ;
Son étrier résonne au cordon de sa selle ;