AVERTISSEMENT
Si j’avais supprimé ce poëme, comme j’ai pu en avoir
l’envie, quelques-uns auraient vu dans cette
suppression une mesquine rancune contre mon héros ;
d’autres auraient soupçonné des adulations, qui,
Dieu merci, n’ont jamais approché de mes lèvres.
J’ai choisi Napoléon pour sujet d’un poëme
héroïque, lorsque ses restes même étaient proscrits
du monde entier. J’ai dénoncé sa mémoire, sitôt
qu’elle est redevenue une puissance. Voilà le seul
genre d’adulation dont j’aie à m’accuser.
On trouvera à chaque page de ce poëme sur un despote
la haine du despotisme. Une partie considérable
de l’ouvrage est la peinture du vertige de mon héros.
Sa chute est annoncée de loin ; s’il tombe, c’est
par sa faute et seulement par sa faute.
J’ajouterai de ce poëme qu’il est le dernier qui
sera composé sur Napoléon. L’époque de la critique
et du jugement de l’histoire est arrivée pour
Napoléon avec plus de rapidité qu’on n’eût pu le
supposer. Chaque jour il descend à grands pas du
sommet de la poésie pour entrer dans l’histoire, qui
demande à chacun le