part de Mrs L —[1], non sans que j’eusse vu, n’étant qu’un enfant de huit ans, des choses dont personne ne se doutait. Elle m’admettait dans sa chambre à coucher, et plus d’une fois son valet de pied, « un homme de belle prestance » selon l’expression qu’on emploie à Londres pour ces gens-là, entra sous de frivoles prétextes dans son cabinet de toilette, qui était contigu. Plus d’une fois je vis cet homme lui prendre la main et la baiser, pendant que de son côté elle rougissait et jetait autour d’elle des regards inquiets. Qu’est-ce que cela signifiait : je n’en avait pas la moindre idée, mais comme j’étais habitué à voir ma mère tenir ses domestiques à la distance la plus respectueuse, je pensai que cela devait être mal, et je n’en parlai à personne. Néanmoins dans la suite, lors de l’affaire d’Oxford, je me rappelai la chose, et tout s’expliqua.
Cependant, quand cette affaire-là fut aussi terminée, qu’elle fut oubliée, la dame publia un livre où elle exposait sa manière de voir sur le gouvernement. J’en entendis parler de bien des côtés comme d’une œuvre peu ordinaire. Mais à cette époque ancienne, en 1794, ses talents, la beauté de sa figure et de sa personne, son habileté sur l’orgue, la force dramatique avec laquelle elle soutenait pendant une scène courte un grand rôle de théâtre, par exemple celui de Lady Macbeth, ses facultés de controverse, et l’usage qu’elle en faisait pour un objet aussi peu convenable à une femme que des attaques contre le Christianisme, tout cela combiné laissait l’impression de quelque grande enchanteresse, d’une Médée, sur tous
- ↑ Lée. C’était le nom du jeune homme d’Oxford qu’elle avait épousé. (Note du traducteur).