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DU MANGEUR D’OPIUM

un autre trait particulier à Oxford, et faisons avec confiance appel aux lecteurs sans préjugés, pour en apprécier la tendance. J’ai dit que les Tuteurs d’Oxford correspondent aux Professeurs des autres Universités. Mais cette équivalence qui est absolue, incontestable au point de vue en question, c’est-à-dire quand nous cherchons quel est le membre de l’établissement duquel dépend l’enseignement proprement dit, — cette équivalence comporte des réserves étendues, quand nous examinons le système d’enseignement. Dans les deux cas, cette idée s’exprime en ces termes : « faire une leçon », mais que signifie ce mot de leçon, à Oxford et ailleurs ? Ailleurs, il signifie une dissertation solennelle, tantôt lue, tantôt déclamée d’une manière théâtrale par le professeur. À Oxford, ce mot désigne un exercice fait de vive voix par l’étudiant, aidé, à l’occasion, de son tutor, exercice qui, pendant toute sa durée, est soumis à ses corrections, à ce qu’on peut appeler ses scholies, c’est-à-dire à des vues, à des perfectionnements qui en suivent les détails. Maintenant, peu importe qu’on soit partisan du système d’Oxford ou qu’on lui soit hostile, sur tous les autres points ; quant à celui-là, je crois qu’il n’y a pas le moindre prétexte à hésiter, à regimber. Une leçon d’Oxford impose à l’étudiant un véritable travail bona fide ; elle ne lui permet de laisser endormir ni son corps ni ses facultés intellectuelles. C’est un vrai exercice, où peut entrer en jeu l’émulation entre les individus, et qui s’exécute sous l’œil d’un lettré éminent. Mais en Allemagne, les jeunes gens sont souvent, à la lettre, endormis sous la déclamation du professeur, et on a peine à voir comment l’attention peut n’être pas distraite par