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DU MANGEUR D’OPIUM

moindre occasion aux reparties de la mauvaise humeur ou de l’imparfaite éducation. Mais quelle que soit la cause, l’effet est tel, à ce que je crois.

Dans un entretien très long et très général sur le cours de mes études, et sur la direction actuelle de mes lectures, le Docteur Cyrille Jackson me traita exactement comme s’il avait eu devant lui un homme de sa situation et de son âge. Comme il en venait, enfin, au sujet même de la visite qui m’avait alors amené chez lui, il mit dans ses façons un peu plus de sa majesté officielle. Il condescendit à me dire qu’il eût été charmé de me compter dans son troupeau, mais, ajouta-t-il, « vos tuteurs n’ont pas agi convenablement. C’était leur devoir de me prévenir au moins un an à l’avance de leur intention de vous placer à Christ-Church. En ce moment je n’ai pas dans tout mon collège une niche à chien qui ne soit occupée. » À cela je répondis qu’il ne me restait qu’à lui présenter mes excuses pour lui avoir pris tant de temps, que de mon côté j’entendais parler pour la première fois de cette demande préliminaire, et que je devais disculper mes tuteurs de toute faute sur ce point, attendu qu’ils n’étaient pour rien dans mes projets actuels. À ces mots le Doyen exprima son étonnement. De mon côté, je m’inclinais déjà pour prendre congé, et j’allais atteindre la porte, quand le Doyen me rappela d’un geste poli pour me faire reprendre ma place sur le canapé que je venais de quitter et me pria de lui répéter mes explications. Je suis convaincu qu’alors le Doyen aurait terminé l’entretien par la promesse de faire en ma faveur une exception à sa règle habituelle. Mais juste à cet instant la voix tonnante des hérauts, qui gardaient le vestibule, annonça quelque impor-