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SOUVENIRS AUTOBIOGRAPHIQUES

jours fait qu’il pleuvait, excepté une fois, et cette fois, la diligence de Shrewsbury m’emportait avec tant de rapidité que je n’ai pas eu le temps d’apprécier l’éclat du soleil et de me rendre compte si je ne traversais pas une contrefaçon dorée de Birmingham, car vous le savez, gens de Birmingham, vous vous entendez en contrefaçons, — vous êtes si malins — en contrefaçons de tout ce qui existe dans le ciel et sur la terre, depuis les foudres de Jupiter jusqu’aux corsages de tailleurs. Donc l’air sombre ne peut être attribué qu’à ma mauvaise chance. Quant au bruit, je n’ai jamais dormi, dans cette énorme Poule et ses poussins[1], où ma destinée m’amenait d’ordinaire, mais j’avais quelques motifs de me demander comment cette Poule si discrète s’y prenait pour faire rentrer au perchoir toute sa couvée vagabonde à des heures aussi variables. Jusqu’à deux ou trois heures du matin, j’étais tenu éveillé par ceux qui rentraient ; et vers trois heures du matin commençaient à entrer en fonctions le portier, ou le décrotteur, ou le sous-décrotteur, qui faisaient leur tournée pour rassembler leurs différents colis destinés au Voltigeur, ou au Tally Ho (Hola ! Hola !) au Bang-up (Tintamarre)[2] dans toutes les directions de la rose des vents, et qui trop souvent, comme cela doit arriver dans ces vastes établissements, se trompaient de porte, et venaient me crier d’une voix effrayante : « Allons, monsieur, les chevaux sont attelés ». Si bien qu’il m’est rarement arrivé de dormir à Birmingham ! Quant à la boue ! elle tient bien à vous, mon ami de Birmingham. Comment faire pour qu’on me la pardonne ? Sachez donc,

  1. Hôtellerie de Birmingham
  2. Noms populaires de voitures publiques.