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CONFESSIONS D’UN MANGEUR D’OPIUM



L’on m’a souvent demandé dans quelles circonstances, par quel enchaînement je suis devenu mangeur d’opium. Fût-ce par degré, par essais, avec défiance, comme on descend par une plage de sable vers les profondeurs de la mer, en sachant d’avance quels dangers on trouve en chemin, en se jouant à ces danger avec une sorte de coquetterie, qui revient en définitive à les braver ? Ou bien encore fut-ce par ignorance complète de ces dangers, en cédant aveuglement aux conseils intéressé d’un empirique ? Plus d’une fois des préparations destinées au traitement des affections pulmonaires on dû leur efficacité à l’opium qui entrait dans leur composition, à lui seul, bien qu’on protestait bruyamment contre cet auxiliaire compromettant : sous ce déguisement fallacieux, une foule de gens se sont laissé attirer dans un esclavage qu’ils n’avaient pas prévu, par un remède ignoré qu’ils ne connaissent ni de nom ni de vue. Il arrive assez souvent aussi qu’on ne découvre les liens d’une abjecte servitude que quand ils ont tissé leur réseau inextricable à travers toute