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AU LECTEUR



Je vous présente ici, bienveillant lecteur, le récit d’une période remarquable de ma vie. S’il répond à mon désir, j’espère qu’il offrira non seulement l’intérêt des faits, mais encore une grande part d’utilité et d’instruction. Je l’ai écrit surtout pour ce dernier motif, et cela doit me faire pardonner d’être sorti de la délicate réserve qui le plus souvent nous empêche d’étaler en public nos erreurs et nos faiblesses.

Le malheureux et le coupable ont une tendance naturelle à fuir les regards du monde ; ils préfèrent l’obscurité et la solitude ; jusque dans le choix d’une tombe, ils cherchent à s’isoler parmi la foule souterraine. On dirait qu’ils renoncent à revendiquer leur part de fraternité dans la grande famille des hommes, qu’ils veulent, comme le dit énergiquement Wordsworth,

                                Exprimer avec humilité
        Leur remords par la solitude.

En somme, dans notre intérêt a tous, il vaut mieux