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pour avec. Cette licence se trouve encore une fois dans une satire de Boileau, et une fois dans la seconde tragédie de Racine ; mais, avant la fin de ce siècle même, elle tomba entièrement en désuétude.

2e Remarque. Au chapitre de l’élision, nous avons parlé de la synérèse, par laquelle la poésie supprime l’e muet intérieur : essaiera (essaîra), avouera, justifiera, enjouement. Mais cette suppression est obligée : ce n’est plus une des ressources du versificateur.

3e Remarque. Pour la désinence des noms propres traduits du latin, il faut, en général, suivre l’usage. Cependant les poëtes ont quelquefois à leur disposition une double inflexions ; par exemple : Claude et Claudius, Mécène et Mécénas, Lélius et Lélie, Porsenne et Porsenna, etc.

Il faut éviter les mots qui aujourd’hui prêteraient au ridicule, comme Brute, Crasse, pour Brutus, Crassus, bien que Corneille s’en soit servi.




CHAPITRE IX.
Des Licences de construction. — De l’Inversion.

Notre prose construit les mots d’une manière fixe et uniforme, que l’on ne peut guère changer. Elle procède suivant l’ordre logique, et place successivement le sujet, le verbe, le régime ou le complément quelconque du verbe, le complément du régime, etc. Elle ne met que rarement le sujet après le verbe, presque jamais le régime avant le verbe, jamais le complément du régime avant le verbe. Telle est la rigueur de sa construction.