Page:Quicherat - Petit Traité de versification française, 1882.djvu/38

Cette page n’a pas encore été corrigée


La facilité à trouver la rime s’acquiert par l’habitude

Lorsqu’à la bien chercher d’abord on s’évertue,
L’esprit à la trouver aisément s’habitue ;
Au joug de la raison sans peine elle fléchit,
Et, loin de la gêner, la sert et l’enrichit.
Mais, lorsqu’on la néglige, elle devient rebelle,
Et, pour la rattraper, le sens court après elle. Boil.

Nous compléterons ce que nous avons à dire sur le sujet qui nous a occupé dans ce chapitre, quand nous parlerons de la succession des rimes et de l’harmonie poétique.




CHAPITRE IV.
De l’Hiatus.

En poésie, l’e muet est la seule voyelle terminant un mot qui puisse être suivie d’une autre voyelle ou d’une h non aspirée. Hors ce cas, la rencontre de deux voyelles forme un hiatus, ou bâillement, qui est sévèrement défendu. Ainsi l’on ne peut dire dans un vers : tu es, tu auras, si elle vient, elle y est.

Boileau a consigné cette règle dans son Art poétique, et l’a rendue sensible par deux exemples qui imitent l’hiatus, sans toutefois être fautifs :

Gardez qu’une voyelle, à courir trop hâtée,
Ne soit d’une voyelle en son chemin heurtée.

à cet argument de la difficulté vaincue. Il rappelle que tous nos vieux genres de poésies, qui aux entraves de la rime en ajoutaient bien d’autres, et qui étaient de véritables tours de force, ont été abandonnés. On aurait pourtant dû y voir, suivant le système qu’il combat, le comble de la perfection. Tels sont le sonnet, le rondeau, la ballade, l’acrostiche, etc.