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de l’emploi de toutes ses forces, et elle est le présage d’un effort heureux.

Mais la société, mais les hommes en général ne sauraient regarder toutes ces choses, ni envisager tous les ouvrages de l’Art d’un coup-d’œil aussi rigide. Sans doute, la perfection imitative est toujours désirable ; elle est nécessaire dans certains cas, et sous certains rapports, au complément des impressions de l’Art ; et toutefois l’expérience et l’analyse des sensations dépendantes d’un monument prouvent qu’un grand nombre d’effets utiles ou agréables n’est pas toujours attaché à une perfection rigoureuse ; elle-même a ses degrés ; la manière de jouir en a beaucoup aussi. D’ailleurs, les grands talens sont si rares, que les chefs-d’œuvre doivent passer pour des exceptions. Il est donc heureux que l’opinion de la société, moins difficile et moins sévère que celle de l’artiste, ait pour tous les talens des emplois variés. Il est heureux que des idées morales relèvent le prix de certains ouvrages, et que le goût du public, dirigé par le sentiment de l’utilité civile, politique ou religieuse, place souvent l’importance de la fin avant l’excellence même des moyens.