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et de pratiquer les Arts, procède la manière non moins abusive de les apprécier. L’insignifiance des ouvrages produit celle des jugemens.

Comme il n’y a que les causes morales, ou les emplois moralement utiles de l’Art et de ses ouvrages, qui imposent à l’artiste l’obligation de produire des impressions fortes ou profondes, de même, ces impressions ne sont reçues du spectateur, que par l’effet d’une corrélation de sentiment entre lui et l’ouvrage. Si ce dernier a une destination fixe, une application à un objet déterminé, le public a, pour juger de sa valeur, sous le rapport moral (c’est-à-dire de l’effet qu’il doit produire), un organe infaillible, celui du sentiment, de cet instinct des convenances, le seul qui sache apprécier toutes les sortes d’harmonies morales.

Si l’artiste, au contraire, n’a voulu que faire montre de son savoir, le spectateur n’apporte à le juger que l’esprit d’une critique dénuée de sentiment, et correspondant à l’esprit dans lequel le tout fut conçu et fut exécuté.

L’esprit de critique, dont je parlerai plus au long, esprit destructeur du ressort qui fait produire les belles choses, est, en grande partie dû à l’étrange système qui a prévalu depuis quelque temps en Europe. On s’est persuadé que le secret de faire