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Tel doit être, ce me semble, le sort de ces ouvrages privés ou destitués d’emploi, et qui n’ont reçu de la part de l’artiste d’autre destination que de faire connaître qu’il sait ce qu’il sait, et comment il sait. Loin que ces sortes de productions, considérées comme morceaux d’étude, tournent au profit de l’Art et de l’artiste, elles atténuent les qualités de l’un et les facultés de l’autre. Leur effet ordinaire est d’inspirer au public une sorte de dégoût pour elles, en excluant du droit d’en jouir tous ceux qui ne professent point l’Art. Cette manière devenue trop générale, a encore l’inconvénient de vicier les ouvrages même qui auraient une destination morale, par l’abus d’une sorte d’affectation scientifique, comparable au ridicule des discours que leurs auteurs hérissaient jadis de citations grecques et latines, attendu qu’ils les destinaient moins à instruire qu’à montrer combien ils étaient instruits.

La science doit exister dans les productions de l’Art, mais sans chercher à y paraître : elle peut y paraître, mais ne doit pas se montrer. Malheur à l’artiste dont le travail n’est pas de nature à plaire à tout le monde ! Les belles choses sont celles qui plaisent aux savans par le savoir, et, indépendamment du savoir, à ceux qui ne le sont pas : ce