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qui est moral repose sur des fondemens durables. Satisfaire le goût du luxe, c’est lui présenter sans cesse des combinaisons dont aucune cause ne peut perpétuer la durée. Il est tellement dans la nature de la mode de varier, qu’elle cesserait d’être, si elle continuait d’être : et on doit en dire autant du plaisir qu’elle donne. Il est au contraire dans l’essence du goût opposé, que le changement y détruise le plaisir, puisque le plaisir qu’il donne repose sur le vrai ; car contre quoi changer le vrai ? Ainsi ce qui excite l’appétit dans les Arts du luxe, est ce qui amène le dégoût dans les Arts du génie. Ainsi les Arts d’imitation et les Arts du luxe, partant de deux principes contraires, servant des maîtres différens, ne peuvent avoir rien de commun dans leurs moyens de plaire.

C’est vicier dans leurs élémens les Arts d’imitation, que de les gouverner ou de les laisser se régir par les idées, les usages et les opinions favorables aux Arts de luxe. Chaque chose veut être dirigée selon le régime analogue à son principe. On peut laisser le goût s’égarer et prendre au hasard sa direction dans la région des fantaisies qui n’amusent que les yeux. Mais on ne saurait trop, dans l’empire des jouissances de l’esprit, ramener le