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moyen de l’y introduire après coup. C’est une greffe tardive que repousse une sève trop avancée.

L’action particulière de l’homme, si distincte de l’action générale de la nature, ne saurait donc suppléer la double vertu qui résulte de ces deux élémens de nécessité. On ne saurait faire ni que les Arts soient nés d’eux-mêmes, ni qu’ils se soient fondus avec les institutions primitives d’une nation.

Il n’en est pas tout-à-fait ainsi du troisième genre de nécessité dont on a parlé, c’est-à-dire des rapports d’utilité que peuvent avoir ou acquérir avec la société les ouvrages de l’Art. Si le génie des artistes, dirigé par ceux qui les emploient, vers un but utile et noble, en reçoit plus de force ; si une destination précise et déterminée des ouvrages rehausse leur valeur, et en explique mieux l’intention aux spectateurs ; si l’accord de l’ouvrage avec sa destination, avec les circonstances et les motifs qui l’ont fait produire, ajoute à son effet et aux impressions qu’on en reçoit, on ne saurait nier qu’il ne soit en notre pouvoir de s’emparer de quelques unes de ces causes secondaires, d’en diriger, d’en développer et d’en conserver l’action.

En effet, les causes dont je veux parler ici sont