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DUMAS  DUMAS

Tome III[1] : les Libérateurs suisses : Werner, Stauffacher ; — Conrad de Bauragarten ; — Guillaume Tell ; — Gessler, — l’Empereur Albert[2]  ; — Pauline ; — Histoire d’un âne, d’un homme, d’un chien et d’une femme ; — une Connaissance d’auberge ; — les poules de M. de Chateaubriand ; — le Righi ; — Alcide Jollivet.

Tome IV : Ponce-Pilate ; — un Mot pour un autre ; — Histoire de l’Anglais qui avait pris un mot pour un autre ; — Zurich ; — les Muets qui parlent et les Aveugles qui lisent ; — Prosper Lehmann ; — une Chasse aux Chamois ; — Reichenau ; — Pauline ; — un Coup de tonnerre.

Tome V : Pourquoi je n’ai pas continué le dessin ; — Constance (ville) ; — Napoléon le Grand et Charles le Gros ; — une Ex-Reine (Hortense, reine de Hollande) ; — une Promenade dans le parc d’Arenemberg ; — Reprise et dénoûment de l’Anglais qui avait pris un mot pour un autre ; — Kœnigsfelden ; — l’île SaintPierre ; — un Renard et un Lion ; — Prise du château de Granson ; — la Bataille (de Granson) ; — Pourquoi l’Espagne n’aura jamais un bon gouvernement ; — Comment saint Eloi fut guéri de la vanité ; — Pauline (3e article) ; — les Iles Borromées ; — une Dernière ascension, — Épilogue (Gabriel Payot).

Grand nombre d’écrivains de notre époque n’ont pas la prétention d’être des hommes de génie, ni de prendre rang parmi les premiers littérateurs contemporains. Aussi le public se montre-t-il plus indulgent envers eux qu’envers M. Alex. Dumas, auquel on doit demander un compte sévère de l’emploi qu’il fait du talent dont il a donné maintes preuves brillantes au début de sa carrière littéraire. On a d’autant plus le droit de le juger avec rigueur que la modestie n’est pas son défaut ; il paraît avoir une conscience très-assurée de ses hautes facultés, et ne manque jamais l’occasion de le faire sentir au lecteur. Or, nous le demandons à quiconque n’est pas aveuglé par un fol engouement qui pardonne tout à l’éclat d’un nom déjà connu : peut-on voir quelque chose de plus niais, de plus misérable que les Nouvelles Impressions de voyage (tomes III et IV de la collection), qui ont eu le triple honneur de paraître : 1o  dans les feuilles volantes du Figaro ; 2o  dans un volume grand in-8, format de ces feuilles ; 3o  dans deux volumes in-8, avec grand luxe de papier blanc ?

M. Alex. Dumas paraît voyager sans rien voir, sans rien connaître, sans rien apprendre des pays qu’il parcourt. Puis, quand il est de retour dans son cabinet, il forge une suite de petites anecdotes plus ou moins plates, dans lesquelles il s’adjuge toujours le principal rôle, et qu’il intitule ses Impressions de voyage. Il vise à la humour anglaise ; mais il n’atteint pas ce but-là aussi bien qu’il prétend avoir atteint celui de la carabine, où il dit avoir stupéfait, par son adresse, tout une compagnie des meilleurs tireurs de la Suisse allemande. Rien n’est plus plaisant que l’accès de vanité naïve auquel s’abandonne M. Alex. Dumas, à la pensée que ces hommes, si inférieurs à lui, pouvaient s’imaginer être ses maîtres en fait de tir à la carabine. Comment donc ? un homme de la grande nation ne sait-il pas tout ? et ces pauvres pâtres de l’Helvétie s’imaginent-ils avoir le coup d’œil plus sur qu’un élégant de Paris ? Mais ce n’est pas tout : M. Alex. Dumas ira chasser le chamois au milieu des glaciers, et ses prochaines impressions nous le montreront, sans nul doute, succombant sous le poids de sa chasse, mais luttant encore d’agilité avec son guide, et sautant les précipices à pieds joints aussi aisément qu’un ruisseau de la grande ville. En voyant avec quel succès admirable il exploite les Alpes, on regrettera plus vivement encore qu’il ne mette pas à exécution son grand projet de voyage à la Méditerranée. Que de prodigieuses découvertes cette entreprise aurait amenées ! On peut en juger par la Pêche aux truites, le Ragoût de marmottes, les Carabiniers et maintes autres choses non moins merveilleuses que le monde doit à ses excursions en Suisse[3].

« L’Histoire de l’Anglais qui avait pris un mot pour un autre, » qui se trouve aux tomes IV et V de ces Impressions, a été présentée comme le décalque d’une anecdote imprimée dès messidor an XIII, dans le Mercure, t. XXI, pag. 29-33, et sous le titre d’Histoire d’un homme timide, racontée par lui-même, trad. de l’angl. de Varlety, par N. Louvet[4]. Cette assertion n’est pas entièrement exacte. M. Dumas en a bien pris tout le fond et tous les faits ; mais, comme toujours, il a brodé sur ce fond, il l’a amplifié, il y a ajouté de nouvelles charges, un commencement d’action et une continuation. Ce sont quatre pages du Mercure ainsi délayées, qui, en 1837, furent achetées par le Figaro six mille francs à M. Dumas !

CII. La Méditerranée et ses côtes. Prospectus. Paris, de l’impr. de Dondey-Dupré (1834), in-8, 4 pag.

« Ayant horreur du doute, comme la nature du vide, le marquis n’oserait concevoir la moindre incertitude ; aussi n’est-il difficulté, voire même impossibilité, avec lesquelles il croie devoir capituler : trois siècles plus tôt, il eût été Colomb ou Améric Vespuce : il s’ingénia un jour de découvrir la Méditerranée, rédigea un prospectus, ne trouva pas d’actionnaires, partit comme s’il en avait mille, ne découvrit rien, malgré les encouragements d’un ministère charmé de l’utilité d’une telle entreprise, et revint enchanté de son idée, de son voyage, et prêta recommencer, ce qui est facile : car il y aura toujours à explorer des mers aussi peu connues que la Méditerranée[5]. »

CIII. Quinze jours au Sinaï, par Alex. Dumas et A. Dauzats. Paris, Dumont, 1838, 2 vol. in-8 ; ou Paris, Desessarts, 1846, 2 vol. in-8 ; et Paris, Ch. Gosselin, 1842, in-18, format anglais.

Ce sont de Nouvelles Impressions de voyage, et les frontispices de 1838 portent même cette indication pour premier titre.

« Après nous avoir donné ses propres impressions de voyage, M. Dumas se charge, à ce qu’il paraît, de nous communiquer celles des autres. Nous ne pensons pas, en effet, qu’il ait jamais mis le pied sur la terre d’Egypte, traversé le désert, gravi le Sinaï. Mais avec les souvenirs de M. Dauzats et le secours de son ima-

  1. Des fragments de ce troisième volume ont paru en 1837 dans le Figaro, sous le titre de Nouvelles Itnpressions de voyage.
  2. Ces cinq épisodes forment ensemble une nouvelle version de Guillaume Tell, dramatisé par M. Dumas.
  3. Joël Cherbuliez, Revue crit. des livres nouveaux, ann. 1836, p. 185-86.
  4. Voyez les Barbus-Graves, par M. Paul Zéro. Paris, 1843. in-8, p. 46.
  5. Plutarque drolatique.