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DUMAS  DUMAS

qu’une cruche dans un vase étrusque, et rien, absolument rien dans Athalie, le Cid et le Misanthrope, il a avili l’art ; il l’a fait passer sous les fourches caudines de la chandelle moulée, du calicot, du molleton ; il l’a fait descendre au niveau de l’étroite conception des patentés dominateurs, du saute-ruisseau, du courtaud de boutique, et de tous les dandys illettrés. Moneta gubernante, papiero timbrato administrante, suifo, cotono, laina, pipere, sucro, canella, clysopompa, sterco-podreta, arabico-racahuto et cahutchucio regnantibus, il a reconnu et courtisé tous ces pouvoirs. Au lieu de les redresser par l’emploi d’une bonne et démocratique orthopédie, de les éduquer, de les élever jusqu’à lui, de leur inoculer le goût du grand et du beau, de les appeler à des jouissances auxquelles ils n’étaient pas faits, avec l’agrément de la plus abrutissante censure, il les a bourrés de leur pâture de prédilection, enivrés de leur propre orgie. Mais entre les charnelles matérialisations des écoles espagnoles et les vaporeuses idéalisations allemandes, il y a l’immense milieu tout français d’une saisissante poésie. C’est là qu’il viendra, n’en doutez pas, car Plutarque, qui s’est mis en tête de faire de la critique et qui en fera, ne souffrira plus qu’il s’égare ; bien mieux, il l’aidera à briser le joug des sottes exigences, en éclairant la route par où il devra passer, en la déblayant de tout ce qui y tient la place de l’art. Si donc le poëte le veut, à la profusion des fausses fleurs succéderont les fleurs qui se fécondent et donnent des fruits, car il est dans la plénitude de sa force. Qu’il cesse enfin de se croire condamné à l’explosive vitesse d’une locomotive, à la magique rapidité du télégraphe électrique, qu’il ralentisse et règle un peu sa course, qu’il s’arrête enfin pour contempler ce que Dieu a mis en lui, et il se convaincra que ces grandes figures florentines : Dante, Michel-Ange, Léonard de Vinci, ne furent taillées sur un plus ample patron que lui-même. Mais le plus précieux des dons de la nature, le génie, ne se conserve et se développe que sous l’influence de la sagesse[1] ».

Il ne nous reste plus qu’à énumérer les pièces pour lesquelles M. Dumas est en nom, et celles pour lesquelles il l’a dissimulé, afin de justifier les assertions des critiques, qui ne veulent pas que M. Dumas soit toujours seul dans les pièces représentées sous son nom, et qui, au contraire, l’ont voulu voir souvent abrité, contre les succès douteux et les chutes, derrière des collaborateurs responsables.

créations, conquêtes[2] et adoptions
littéraires de M. Alex. Dumas[3].
1825-46.
« Ce sont les hommes, et non pas l’homme, qui inventent. Chacun arrive à son tour et à son heure, s’empare des choses connues de ses pères, les met en œuvre par des combinaisons nouvelles, puis meurt après avoir ajouté quelques parcelles à la somme des connaissances humaines. Quant à la création complète d’une chose, je la crois impossible. Dieu lui-même, lorsqu’il créa l’homme, ne put ou n’osa point l’inventer : il le fit à son image. C’est ce qui faisait dire à Shakespeare, lorsqu’un critique stupide l’accusait d’avoir pris parfois une scène tout entière dans quelque auteur contemporain : C’est une fille que j’ai tirée de la mauvaise société pour la faire entrer dans la bonne. C’est ce qui faisait dire plus naïvement encore à Molière : Je prends mon bien où je le trouve. Et Shakespeare et Molière avaient raison, car l’homme de génie ne vole pas, il conquiert. Il fait de la province qu’il prend une annexe de son empire ; il la peuple de ses sujets, et il étend sur elle son sceptre d’or !!! Je me trouve entraîné à dire ces choses parce que, loin de me savoir gré d’avoir fait connaître à notre public des beautés scéniques inconnues, on me les marque du doigt comme des vols, on me les signale comme des plagiats. Il est vrai, pour me consoler, que j’ai du moins cette ressemblance avec Shakespeare et Molière, que ceux qui les ont attaqués étaient si obscurs qu’aucune mémoire n’a conservé leur nom !!! »
M. Alex. Dumas.
« Il n’y a plus d’hommes
de lettres ; il y a d’honorables négociants plus ou moins lettrés qui mettent en commun des intérêts, forment des sociétés par-devant notaires, se font représenter par des gérants. La juridiction des écrivains, c’est maintenant le tribunal de commerce… — Et ceux qui dégradent l’art à ce point, qui font de la littérature un métier !… — Sont très-bien vus, je t’assure. »
Le Succès, acte 1, sc. 4.
  1. Plutarque drolatique, p. 70.
  2. « L’homme de génie ne vole pas, il conquiert. »
    M. Alex. Dumas
    .
  3. On ferait grandement erreur en supposant que cette notice bibliographique de M. Alex. Dumas est empruntée à la « Littérature française contemporaine, » parce qu’elle vient après celle donnée par MM. Louandre et Bourquelot. Ces messieurs font des emprunts à leurs