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RÉCITS DU LABRADOR

blanc », qui provoque un jet de sang à chaque piqûre.

Je subis avec patience les coups du « frappe d’abord », les impressions cautérisantes du microscopique « brûlot » ; mais le culex, je le hais, je le méprise, je voudrais le conspuer et le martyriser pendant toute une éternité.

Il est d’une hypocrisie de bonze, d’une rouerie d’esclave. Il se cache sous les couvertures, dans les replis de la tente, sous les branches de sapin de votre lit. Il s’embusque jusque dans les chaussettes pendues au-dessus du poêle chaque soir et, lorsqu’il vous croit endormi, se glisse hors de ces repaires d’occasion, s’approche cauteleusement de votre chair qu’il pique et suce jusqu’à satiété, puis s’envole l’abdomen alourdi de sang. Tout lui est bon pour atteindre son but. La moindre fissure, la moindre solution de continuité et le tuyau de poêle lui-même lui suffisent pour s’introduire sous la tente où vous vous proposiez de goûter un repos, quelquefois, je devrais dire presque toujours, bien gagné.

Oh ! le culex ! j’ai tout fait pour m’en débarrasser. Je me suis oint des plus invraisemblables culexicides. Je me suis frotté d’ail pilé, de beurre, de graisse de loup marin. J’ai tout employé. J’ai failli mourir asphyxié plusieurs fois en respirant les