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RÉCITS DU LABRADOR

après, à moitié mort de faim, de fatigue et de soif. »

J’avais écouté ce récit avec recueillement. Quand il fut terminé, je levai les yeux et je rencontrai ceux de Thomas. Ils exprimaient avec tant d’éloquence la terreur, le triomphe et le mépris, que je ne pus m’empêcher de rire, au grand scandale du narrateur.

— Vous n’y croyez donc pas, monsieur ? me dit-il.

— Si, si, répondis-je. C’est Thomas qui me fait rire. Il a pris votre noyé pour un marsouin blanc. Est-il bête, hein !

Thomas était indigné.

— Monsieur, me dit-il, je ne suis pas bien fin, mais je ne suis pas un monsieur ![1] Et je vois ce que je vois.

Après ces paroles épiques, je n’avais plus qu’à me taire… et je me tus.

Le lendemain, je continuai mon voyage.

Depuis, je n’ai jamais revu l’anse du Trépassé.

  1. Notes de l’auteur — Sur la côte un paresseux est un monsieur ! un fou est un monsieur ! un cochon est un monsieur ! etc…