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RÉCITS DU LABRADOR

traversa sans encombre le déluge et parvint jusqu’à nous sans modification apparente de sa nature et de ses instincts primitifs. Il est d’une subtilité extrême, et capable, pour vous sucer le sang, des ruses les plus étonnantes et les plus perfides. Son indiscrétion dépasse toute mesure, et le corps humain est pour lui piquable, mordable et suçable en toutes ses parties. Rien ne l’arrête, ni le sommeil de l’innocence, ni le repos troublé du crime. Il mord, pique et suce toujours.

Mais avant de vous conter combien je fus sa victime, je vous dois sa généalogie.

Il est inutile, je pense, de descendre des Croisés — et quelquefois d’en être trop descendu — pour avoir droit à l’histoire de ses ancêtres.

Contrairement à ce qui se passe pour les hommes, le maringouin est resté sensiblement semblable à ses aïeux. Il n’a pas dégénéré.

Culex Ier, qui fut de très près contemporain des premiers marécages putréfiés, abandonna la famille des némocères, où il appartenait à l’ordre des diptères, pour fonder l’illustre tribu des culicides.

Pline connut les descendants de Culex, que les Grecs appelaient empis, et ce naturaliste si véridique, qui poussa l’amour de la science jusqu’à se faire tuer en observant