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RÉCITS DU LABRADOR

localités du golfe Saint-Laurent qui doivent leur servir de séjour pendant l’été. La route suivie par ces derniers est toujours sensiblement constante et des bandes considérables d’eiders franchissent à des époques identiques des pointes de la terre ferme où des îles du large toujours les mêmes. À marée basse les chasseurs se cachent sur ces pointes, et fusillent avec empressement les infortunés voyageurs dont ils apprécient la chair plus encore, peut-être, que la plume.

Ce passage dure une dizaine de jours environ, puis il diminue rapidement, et finit par cesser entièrement au bout d’un mois.

Tuer une moniac est une œuvre assez facile, et toujours, à mon avis, indigne d’un vrai chasseur. Son vol est assez lourd, assez direct et sans crochet, son volume assez considérable pour qu’on ne puisse se considérer comme un habile tireur… en tuant ou blessant à chaque coup l’une de ces pauvres bêtes. Le mâle, malgré la beauté de son plumage, excite moins mes sympathies. Mettre à mort une femelle est un assassinat odieux qu’il faudrait rigoureusement interdire en toute saison et punir sans pitié. Le meurtre du mâle pourrait être considéré comme un simple délit pendant la fermeture et autorisé du premier septembre au premier avril.