Page:Puyjalon - Récits du Labrador, 1894.djvu/28

Cette page a été validée par deux contributeurs.
27
RÉCITS DU LABRADOR

plus complête philosophie et s’éloignent gravement, sans précipitation, d’un vol égal, mesuré, et en croassant des notes en gamme mineure très sombre, sans doute les requiescant des goëlands destinés à reposer, sur un lit de patates et de lard, dans l’estomac insatiable des chasseurs.

Ils abondent, malgré l’enlèvement de leurs œufs, dans le golfe Saint-Laurent. Certaines îles, comme l’île Nue du groupe de Mingan, quelques pointes, comme celles d’Anticosti, en sont littéralement couvertes à la saison de la ponte. Malgré cette abondance, il est très difficile de les atteindre, tant ils sont défiants et toujours sur le qui-vive. Ils mesurent avec une étonnante précision la distance qui les sépare du chasseur, et il est très rare que l’on puisse les tirer à plomb à bonne portée. Ce sont des oiseaux superbes, surtout les manteaux noirs, dont l’envergure atteint quelquefois cinq pieds et demi. Leurs bouts d’ailes servent à confectionner de magnifiques plumeaux ; leur fémur, des tuyaux de pipes estimés, et je m’étonne que leurs plumes blanches, fort belles et très ornementales, ne soient pas employées par l’industrie des plumes de luxe.

Les goëlands possèdent des connaissances spéciales en météorologie ; du moins, certaines de leurs habitudes fournissent de