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RÉCITS DU LABRADOR

blancs n’a pu parvenir à le déformer et à l’alourdir. Aujourd’hui, les sauvages de la côte nord se distinguent bien plus des blancs par des nuances psychiques que par des différences physiques accusées. Ils sont catholiques comme nous, plus honnêtes que nous, moins sottement superstitieux et beaucoup plus instruits. Il est rare de rencontrer un sauvage ne sachant ni lire ni écrire. Ils correspondent entre eux au milieu des bois. Leurs boîtes aux lettres sont des troncs d’arbres désignés et leur papier des fragments d’écorce de bouleau.

Depuis que les Pères Oblats se sont fixés sur la côte et qu’ils réunissent autour d’eux, en deux missions annuelles, les Montagnais sortis du bois, les mœurs de la tribu sont devenues des plus pures. Le vol est presque inconnu.

Malgré leur orthodoxie, les sauvages ont conservé quelques-unes de leurs anciennes croyances aux esprits mauvais. Ils voient le diable sous la forme d’un être immense, d’apparence humaine, sans tête, et dont les épaules atteignent le sommet des arbres les plus élevés de la forêt. Lorsqu’ils le rencontrent, ils abandonnent sans délai le territoire où ils l’ont vu, fût-il le plus giboyeux du monde. Ils croient aussi à la possession du corps humain par le Maudit,