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PHYLLIS

Il dominait de très haut la pauvre petite créature, que j’étais. Je faillis reculer de peur, mais, la seconde d’après, la colère reprenant le dessus, me souleva à sa hauteur.

— Comment osez-vous me tenir un pareil langage ? À moi qui étais venue pour me faire pardonner… pour vous dire… vous dire…

Je n’y tins plus et éclatai en sanglots.

Au milieu de mes larmes, je trouvai, pourtant, le moyen de m’écrier :

— Et Blanche ?… Et Blanche ?… Vous ne lui faites pas la cour ?

— Phyllis ! Oh ! quelle folie ! Moi, me soucier de cette mondaine quand je vous ai, vous !… Vous, ma bien-aimée… mon enfant chérie !…

Ses bras autour de moi, ma tête appuyée à sa poitrine, je pleurai de toutes mes forces, soulagée tout d’un coup de ma longue contrainte, et, comme il murmurait des paroles de tendresse pour me consoler, je faillis bien encore ouvrir tout mon cœur…

Mais je me trouvai ridicule, j’eus peur de me faire moquer de moi, je ne sus comment m’expliquer. J’étais trop heureuse du retour de notre affection mutuelle et sans nuages, pour risquer de la troubler en ouvrant de nouvelles discussions.

— Maintenant tout est fini, disait Mark en tapotant mes joues, j’avoue même que je suis assez flatté de votre jalousie à l’égard de cette pauvre Blanche, cela prouve que vous commencez à avoir un peu d’amitié pour moi.

— Oh ! amitié est un mot beaucoup trop faible ! Je crois que je vous aime maintenant plus que personne, excepté…

— Billy et maman ! fit-il en imitant ma voix, c’est votre vieux refrain !

— Vous vous trompez ! J’allais dire mère seulement ! Vous avez dépassé Billy !

— Quel triomphe ! Billy m’avait toujours paru mon rival ! le plus formidable ! Nous progressons ! Peut-être même qu’avec le temps j’arriverai à vaincre mère.

— Que je suis contente, dis-je en riant, d’avoir battu la charge sur votre porte avec ma brosse. Vous étiez pourtant bien décidé à ne pas me laisser entrer ! Que c’est bon d’être amis de nouveau ! La jalousie n’est-elle pas une horrible peine…

— Oh ! oui, répondit Mark doucement. Mais vous n’avez pas lieu d’être jamais jalouse, ma chérie. Combien de fois vous ai-je dit que je n’avais aimé personne avant vous ?

— Cela, dis-je d’un air aussi profond que je pus le prendre, c’est une autre question. On croit toujours