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PHYLLIS

patins, et ils ne sont jamais là quand c’est nécessaire, fis-je avec impatience.

— Garlyle, pour une fois, je suis certain que vous voudrez bien rendre à Mrs. Carrington le service de lui ôter ses patins, dit Mark d’un ton bizarre.

— J’en serai charmé, répondit courtoisement sir Francis en s’inclinant devant moi.

J’étais prête à pleurer d’énervement.

— Suivez-moi aussitôt que vous le pourrez, reprit Mark.

Et il s’éloigna rapidement.

— J’ai bien peur de vous avoir attiré des désagréments, dit sir Francis en baissant la voix, comme, incliné sur mon pied gauche, il luttait avec une courroie récalcitrante. Je voyais à peine son visage penché, mais je crus y discerner une expression malicieuse.

— Que voulez-vous dire ? fis-je d’un ton hautain.

— Mais, je crains que Carrington ne vous en veuille pour être venue ici… seule avec moi.

— Oh ! avec vous ou avec un autre, cela n’avait aucune importance ! rétorquai-je avec violence.

Je fis un brusque mouvement qui envoya rouler mon patin à deux mètres et sir Francis manqua tomber à la renverse.

— C’est tout simplement qu’il n’aime pas attendre… et si vous ne m’aviez pas entraînée dans cette sotte aventure… ajoutai-je avec le mépris le plus impudent de la vérité. Ne pourriez-vous vous dépêcher un peu plus ?…

La parole s’arrêta sur mes lèvres.

Mark revenait à nous presque en courant.

Son visage était bouleversé, je ne l’avais jamais vu aussi pâle, une émotion extraordinaire faisait trembler sa voix.

— Allons, Phyllis, me dit-il avant même d’être auprès de moi, je vous ai dit de vous presser, vous n’êtes pas prête ?

— C’est ce maudit patin ! fis-je en levant la tête pour l’examiner.

Je fus surprise de voir qu’il ne me regardait plus ; il s’était arrêté à deux pas de nous et il fouillait la piste d’un œil scrutateur. Qui cherchait-il, puisque j’étais à côté de lui ?

Tout à coup, il ramena ses yeux sur moi, et vit sir Garlyle qui n’arrivait point à détacher mon patin. Saisi de colère, il poussa légèrement son ami et, prenant mon pied sans souci de me faire du mal, il tira violemment le patin, le jeta au loin, puis, me saisissant par les épaules, il me mit debout.

— Habillez-vous ! murmura-t-il d’une voix rauque. Je vous ai apporté vos affaires.