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PHYLLIS

droit où je demeure et ce qu’elle trouve en moi de si intéressant.

— Je vous demande seulement d’être prudente ? Que dirait Mark s’il savait que vous liez conversation avec une inconnue, une étrangère, aux yeux de tout le Comté.

— Le Comté en pensera ce qu’il voudra !

— Ce qui me rassure c’est qu’il est presque dix heures et qu’elle n’est pas encore là… Elle ne viendra pas, ajouta-t-il avec beaucoup de flegme, et j’en suis enchanté. Comment aurais-je expliqué aux yeux de votre mari…

— Oh ! laissez, mon mari tranquille, criai-je avec impatience. Je ne veux pas en entendre parler !

Il allait répliquer, mais au même instant, levant les yeux, je m’arrêtai stupéfaite… Mark était à trois pas de moi.

Son regard fixe avait une expression nouvelle, une expression qui éveilla en moi la terreur quand je l’aperçus.

— Mark, balbutiai-je, oubliant que je me considérais comme offensée par lui, n’ayez pas l’air si furieux. Je me suis bien amusée aujourd’hui et… j’ai voulu recommencer ce soir.

« Nous devions repartir à dix heures. Je pense que nous avons le temps.

Il ne me répondit rien et fit quelques pas vers la sortie.

Sir Francis lui adressa la parole en s’arrêtant pour enlever ses patins.

— Vous voyez ce que c’est que de se lancer dans la dissipation, Carrington ; faute d’un sport plus intéressant, nous nous sommes livrés aux joies folâtres de ce ring villageois. C’était peut-être une folie de ma part de décider Mrs. Carrington à m’accompagner, mais vraiment il n’y avait pas de crainte qu’elle prit mal : nous n’avons pas cessé de patiner.

Il ajouta ces paroles comme si mon mari n’avait eu, en me voyant au skating à cette heure tardive, seule en sa compagnie, que l’unique crainte de me voir attraper un rhume.

— En avez-vous assez maintenant ? daigna dire Mark avec le plus grand calme.

Trop de calme, même, ses yeux lançaient toujours des lueurs inquiétantes et je me demandai ce qui viendrait ensuite.

— Il se fait tard, dit-il encore, en regardant sa montre, les autos sont devant la porte, il ne serait pas séant que Mrs. Carrington fit attendre ses invités.

— J’ai besoin d’un domestique pour enlever mes