Page:Ptolémée - Almagest, traduction Halma, 1813, tome1.djvu/23

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
xiij
PRÉFACE.

Ératosthène, successeur d’Aristarque dans l’école d’Alexandrie, y fit placer les grandes armilles pour observer les équinoxes dans le portique où Ptolémée dit qu’elles étoient dressées. Nous avons encore ses catastérismes ou descriptions des constellations. Archimède en Sicile, s’étoit fait à cette époque un nom immortel par ses travaux astronomiques autant que par ses découvertes en géométrie. Son arénaire prouve ses connoissances approfondies en astronomie. Ptolémée rapporte son observation des solstices, et Cicéron vante beaucoup son planétaire, élégamment décrit par Claudien. Conon de Samos, connu par un vers de Virgile, est souvent cité par Ptolémée. Enfin, après Apollonius de Perge, qui imagina les épicycles si utiles à l’ancienne astronomie, vint à Alexandrie, dans le deuxième siècle avant J.-C., Hipparque qui porta dans l’astronomie la même perfection qu’Archimède et Apollonius avoient introduite dans les mathématiques.

« Hipparque, à qui, pour me servir des expressions de Pline[1], la nature avoit dévoilé ses mystères, génie extraordinaire qu’elle sembloit avoir élevé au-dessus de la condition humaine, et qui exécuta ce qu’un dieu même n’eût achevé qu’avec peine », Hipparque rassembla les observations anciennes, les calcula, et abandonnant les périodes employées jusqu’à lui, s’ouvrit une route nouvelle et plus sûre, par les méthodes géométriques qu’il créa. Il composa des tables des mouvemens célestes, un catatogue d’étoiles, et des mémoires sur les diverses parties de l’astronomie. Les travaux auxquels ce laborieux astronome se dévoua avec un succès égal l’amour pour la vérité, que Ptolémée loue en lui, firent naître la trigonométrie rectiligne et sphérique dont il sentoit le besoin pour la résolution des difficultés qu’il rencontroit à tout moment dans la pratique de l’astronomie. Cette nouvelle branche de la géométrie fut ensuite cultivée avec un soin particulier par Théodose et Ménélas, et employée par Ptolémée avec l’habileté que l’on verra dans son ouvrage[2].

Cent ans environ après Hipparque, Geminus rédigeoit à Rhodes les élémens de la science astronomique, sous le titre d’Introduction aux phénomènes. Cléomède composa ensuite sa théorie cyclique des corps célestes, et Sosigène d’Alexandrie fut chargé par Jules-César de réformer le calendrier. Dans la vingtième année de l’ère chrétienne, Aggripa observoit en Bithynie la conjonction de la lune avec les pléïades, comme nous l’apprend, Ptolémée. Enfin Théon l’ancien, originaire de Smyrne, remplissant dans l’école d’Alexandrie, la place des Aristarque, des Ératosthène et des Hipparque, y fit des observations que Ptolémée nous a transmises en succédant lui-même à ces grands hommes.

Ce précis nous montre l’astronomie grecque, incertaine et foible dans son enfance ; variant ensuite, à mesure qu’elle acquéroit plus de force, les périodes que Thalès et ses successeurs lui ajoutèrent ; et prenant enfin par les efforts d’Hipparque un essor plus rapide qui l’a portée à cette hauteur qu’elle n’a jamais passée depuis. Mais toutes ces connoissances, toutes ces observations, toutes ces méthodes, fruits de tant de siècles, de veilles et de travaux, restoient isolées et comme ensevelies dans les

  1. Plin. Hist. Nat. lib. I, c. 5.
  2. Mersenn. Pras. Mathem.