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PRÉFACE.

lunaires anticipoient de 9 jours sur la période solaire ; et jamais les deux astres, dans ces périodes, quelque variées qu’elles fussent, n’auroient pu s’accorder, parceque l’année solaire n’est pas de 365 jours, juste, ni le mois lunaire de 30 jours précis.

M. Schaubach de qui j’emprunte ce détails, dit[1] « qu’à en croire Geminus, on institua la période de 8 ans ou 2 922 jours, qui sur 99 mois en avoit trois intercalaires. L’année solaire étant de 365 jours, et l’année lunaire de 354, en huit ans la différence 11 jours fait 90 jours ou trois mois qu’on ajouta au bout de ce temps, pour ramener les fêtes aux mêmes saisons ; et pour plus d’uniformité, on convint d’insérer le premier de ces mois intercalaires dans la troisième année à l’expiration de la deuxième, le second après la quatrième, et le troisième après la septième. S’il ne s’agissoit, dit Geminus[2], que de trouver une coïncidence de ces deux sortes d’années, cette période pourroit suffire, mais il faut qu’outre les années, les mois et les jours s’accordent avec la lune. Le mois lunaire contient exactement 29 jours et de jour. Or une octaétéride comprend 99 mois, les intercalaires compris, ou 2 923 jours, tandis que 8 années solaires de 365 jours font 2 922 jours, c’est-à-dire un jour et demi de moins, ou trois jours en 16 ans. Ce seroit 30 jours en 160 ans, au bout desquels il faudrait par conséquent ajouter un mois. Il paroîtroit donc, continue M. Schaubach, que depuis Solon jusqu’à la 60e olympiade, les Grecs n’ont employé que la simple intercalation toutes les deux années, et qu’ils y substituèrent peu à peu celle de 4 en 4 ans. Elle étoit peu exacte ; mais comme on n’avoit pas un terme fixe pour commencer l’année, on ne s’en appercevoit pas. Ce furent Matricetas et Cléostrate, selon Théophraste, qui introduisirent la période de 8 ans, à laquelle on apporta dans la suite la correction marquée par Geminus, qui ne dit pas quel en fut l’auteur. Peut-être, que ce furent Harpalus, Nautelès, Mnélistrate et d’autres qui s’en occupèrent après Cléostrate, suivant Censorin. Démocrite imagina une période de 82 ans avec 28 mois intercalaires. Or la différence des 82 années solaires et lunaires est de 841j 18h 40′ 13″, et 28 mois intercalaires font 826j 20h 33′ 24″, qui donnent ainsi 14j 22h 6′ 49″ de moins qu’il n’en faut : aussi cette période ne fut-elle pas adoptée. Elle auroit pu l’être, s’il eût fait les mois intercalaires de 30 jours chacun, il n’y auroit eu qu’un jour 18h 40′ 13″ de moins qu’en 82 années.

Tout cela jettoit dans des erreurs inévitables. Pour y obvier, Euctémon et Philippe, selon Geminus, ou Méton, selon Diodore de Sicile, établirent la période de 19 ans. L’usage que Thalès, et sans doute à son exemple, les philosophes suivans, en avoient fait pour rechercher et prédire les éclipses, aura fait naître à Méton et à Euctémon l’idée de l’appliquer la détermination de la longueur de l’année. Ce fut une idée heureuse, car cette période de 6 940 jours ayant 235 mois dont sept sont intercalaires, 110 caves ou de 29 jours et 125 pleins ou de 30 jours, fixa l’année à 365 jours et concilia les mouvemens du soleil et de la lune puisqu’à la fin de cette période, ces deux astres se rencontrent à peu près au point du ciel d’où ils étaient partis, dit Montucla. Ce cycle luni-solaire fut établi l’an 433 Julien avant J.-C., le 16 juillet, 19e jour après le solstice d’été ; et la nouvelle lune qui arriva ce

  1. Gesch. der griech. astron.
  2. In Petav. Uranol. ch. 6.