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terres de soleil et de sommeil

Près d’une case, trois belles jeunes filles, toutes nues, écrasaient du mil dans un même mortier. Elles avaient de longues jambes fuselées, le rein souple et de gentilles figures très douces. Elles chantaient, en laissant retomber alternativement leur lourd pilon de bois. (En ce pays, les jeunes filles sont nues : et les femmes mariées portent une ceinture en paille finement tressée où pend un petit paquet de feuilles ; elles n’ont pas de bijoux ; les hommes seuls mettent des bracelets et des colliers.)

Des jeunes hommes souples et grands, aux traits fins et purs, nous regardaient passer sans rien dire, avec de grands yeux étonnés. Il faisait un silence lourd et animal.

Près du tata du chef, semblable aux autres demeures, j’ai fait mettre en tas mes pauvres bagages et j’ai bourré ma pipe, sans penser, heureux de vivre. Près de moi, le petit Sama s’est mis à jouer au patara[1] avec deux

  1. Jeu qui consiste à lancer à terre quatre ou six petits coquillages appelés cauries. Le joueur gagne lorsque le nombre de coquillages tombant à l’endroit ou à l’envers est un nombre pair.