Page:Psichari - Terres de soleil et de sommeil (1917).djvu/95

Cette page n’a pas encore été corrigée
61
terres de soleil et de sommeil

unes des autres, de sorte que parfois les villages se touchent presque… Habi, Nakanndi, Tohan, Gasa, Gaki — et tant d’autres, entrevus à peine dans notre marche rapide vers le Nord-Ouest.

Quelle détresse inexprimable, je me rappelle, que cette grande équipée. Sama, lui, ne pense pas ; il n’est pas triste, il n’est pas gai ; il attend demain sans hâte, avec le seul regret de ne pouvoir rester une journée entière à jouer du bandjo et à chanter comme autrefois.

Car le Baya n’est pas résigné et fataliste comme le musulman ; il veut jouir des biens de la vie ; il a la passion de la vie et il jouit d’elle intensément. Mais il ignore le temps et l’angoisse de sa fuite. Sama, petite âme enveloppée, ami des mauvais jours, ton être me devient familier, comme un objet auquel on s’accoutume. C’est le plaisir des yeux, la paix du cœur…

La brousse est un jardin d’automne. Les feuilles mortes chantent. Les arbres se pressent, la plupart dénudés, mais beaucoup encore sont