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terres de soleil et de sommeil

il n’admire. Que lui font les pays nouveaux et les manières des blancs ? Retrouvera-t-il, quelque part, ses cases de chaume, et sa vieille « nana » et les petites « boukos »[1] de la Sangha ! Sama est maintenant mon ami ; il ne me quitte plus ; il est content de porter mon fusil. Sur le sentier, Sama chemine près de moi ; nous causons. Quelquefois, il rit et cela nous rapproche un peu, parce que nous rions pour la même chose, lui et moi, lui si différent de moi, si loin de moi… Ami Sama, petite bête si jolie, petite âme si simple et si compliquée, que je voudrais connaître, savoir toute ta vie, tout ton cœur, et tes pensées !

Sama me fait oublier la tristesse morne de cette plaine interminable, et toute la misère humaine de cette colonne perdue dans les solitudes de l’Afrique. Oublier ? non, mais toutes ces misères, tressées ensemble par la pitié, font, dans le désert mauvais, de la force, de la beauté, de la tendresse…

Soudain, une émotion étrange m’envahit. Je

  1. Nana, mère. Bouko, femme.