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terres de soleil et de sommeil

rencontre sur les chemins, la sagaie haute, se hâtant vers les villages, avec tout le mystère de l’impénétrable brousse dans leurs grands yeux étonnés. On ne sait d’où ils viennent, ce qu’ils font, moins encore leurs sentiments et leurs pensées secrètes. Derrière la simplicité de vie du sauvage, derrière la rudesse apparente des mœurs, se cache une extrême complication de sentiments, point du tout primitifs, mais rattachés, au contraire, par des racines profondes, à tout un passé obscur et lointain.

Encore que le sud du pays baya ait été sillonné par les voyageurs un peu dans tous les sens, nous ignorons tout des grands drames qui se sont joués sur cette terre, des idéals inexprimés, peut-être à demi conscients, qui travaillent ces cerveaux de rêveurs, des mystérieuses alchimies des consciences. Chose plus grave, nous ignorons cela, parce que les Bayas veulent que nous l’ignorions. Ils entendent ne pas se livrer, ne nous montrer d’eux-mêmes que ce qu’ils désireront nous en montrer.